J'ai écrit un blogpost précédent au sujet des démons-oiseau dans le domaine funéraire.
Un autre animal qui partage son appartenance à l’outre-tombe est le chien, ou le loup. Chien et loup sont interchangeables dans le monde ancien et dans le domaine de l'archétype, peut-être parce que la domestication du chien était encore bien loin de l'actuelle, et des croisements entre chien et loup pouvaient continuer, surtout dans les pays, comme l'Italie, où la présence du loup a été constante. Par exemple, le chien Cerbère est gardien et borne d'entré des Enfers, le shakal Anubis est le dieu qui préserve le défunt à travers l'outre-tombe, dans le folklore des Balkans ce sont les chiens qui protègent les morts des esprits malins dans les cimetières, mais en Écosse comme en Angleterre c'est un chien noir qui annonce la mort de qui le voit. Le loup est l'animal parèdre d'Aita, (Hadès étrusque), mais aussi d'Apollon qui, pendant tout l’archaïsme était représenté plutôt comme un dieu vengeur et destructeur : nous le voyons se servir de son arc pour répandre la peste, par exemple, dans l'Iliade et en effet, dans l'époque archaïque, le lien entre Apollon et sa sœur jumelle Artémis était beaucoup plus étroit que à l'époque classique, quand son image et son culte se civilisèrent amplement et ses aspects solaire et poétique prirent le dessus. Parfois, dans l'époque archaïque, Apollon est représenté en forme de loup et un de ses appellatifs, Apollon Licée (Lykaios) signifie Apollon de Lycie, qui est (Lykaia) la terre des loups.
Il existe des représentations archaïques de la mort d'Achille, qui se déroule dans le temple d'Apollon, selon une variante du mythe, où le héros fut attiré par la promesse d' épouser Polissène, fille de Priam et abattu par une flèche de Paris dans le talon, le seul endroit de son corps qui ne fusse pas invulnérable. Beaucoup de ces scènes ont lieu près d'une fontaine, en accord avec les sources pseudo-homériques et, dans une d'elles, peinte sur une amphore conservée aux Musées Vaticanes, la statue au milieu de la fontaine est une figure anthropomorphe, poilue, à la tête de loup. Il y a peu de doute qu'il s'agisse d' Apollon Lykaios. Malheureusement, une reproduction photographique de cette amphore est pour moi introuvable, mais la figure du loup-Apollon ressemble beaucoup à celle peinte dans le plat étrusque ici à côté, où nous voyons au milieu un homme-loup dans la posture de la « course agenouillée » |
Et, dans l'anneau extérieur, un centaure, un démon ailé féminin et un archer muni peut-être d'une massue, ce qui l'identifierait presque certainement avec Heraklés, et le centaure, par conséquence, avec Nessus.
Les sources homériques utilisent souvent des épithètes pour les dieux qui nous font penser que ces derniers auraient pu avoir forme anthropo-zoomorphe : « Hera boopis ( Héra au visage/yeux de vache) » en est l'exemple plus courant. Il se pourrait que dans les origines pré-archaïques les dieux grecques ressemblassent plutôt à ceux de l’Égypte ou de l'ancien Hindouisme, de la Mésopotamie ou encore des cultes bons-chrétiens de quasiment toute l'Amérique...
L'évolution est la représentation classique des dieux avec des animaux parèdres ( l'aigle pour Zeus, le cerf pour Artémis...) ou vêtus avec des peaux d'animaux : la peau de lion pour Héraclès, celle de loup pour Hadès, comme nous le voyons dans une variante étrusque du IV siècle a.J.
Aita ( Hadès) a le chef couvert d'une tête de loup dans le tombeau de l’Orc II et dans le Tombeau Golini I. Des correspondances dans d'autres sociétés nous confirme une origine extatique -religieuse de ce type de vêtements. Dans la mythologie scandinave les dieux (Odhin, Loki, Figg) peuvent voler grâce à des manteaux de plumes d'aigle, ou, en nous rapprochant à notre recherche, se comporter et tuer comme des ours ou des loups grâce à leur peaux d'ours ( berserk) ou de loup ( ulfhédnar). Dans le monde roman ce sont les Hyrpi Sorani, prêtres du mont Soracte, qui portaient des peaux de loup et qui honoraient cet animal comme émissaire du dieu Suri, ensuite identifié ou remplacé par Apollon.
Un étude comparatif avec l’ethnographie permet de confirmer que déjà des sociétés de type préhistorique pratiquaient l'identification avec le prédateur abattu, dont la peau conservait les pouvoirs et les qualités. Le loup, pour sa capacité de coopération en meute, pour son intelligence et sa force, a eté parmi les prédateurs les plus admirés. Dans le monde hittite aussi, les loups sont vu selon ces aspects positifs, portés jusqu'à en faire symbole d'omniscience. C'est avec l'arrivée de l'élevage dans le Néolithique que le loup devient antagoniste, mais reste objet de culte. |
Seulement le Christianisme arrive a en effacer les aspects positifs, (on ne s'attarde pas dans cet article sur la symbologie de fertilité porté par le loup dans le monde romain, celtique, chinois...) ici j'ai voulu seulement, et brièvement, souligner les liens entre le loup-chien et la mort. Je continue donc avec quelques exemples ultérieurs : dans l' Égypte ancien les figures de chien-chacal, qui accompagnent le défunt à travers la mort sont trois : Khentamentyu, Upuaut et Anubis.
Upuaut, “celui qui ouvre la voie”, est un loup qui indique la voie que les défunts doivent suivre dans l'Au-déjà.
Khentamentyu, “le premier des Occidentaux”, est un chacal et deuxième borne vers l' Occident, Domaine des morts parce c'est là que le soleil meurt chaque jour.
Enfin, Anubis, divinité des Enfers à tête de chacal, préside à l'embaumement du corps et au jugement de l'âme, en posant le cœur du défunt sur le plat d'une balance, et une plume sur l'autre plat. Si le cœur pèse plus que la plume, il est donné en pâture à Ammit, démon à la tête de crocodile, corps de lion et pattes d'hippopotame.
Dans la mythologie Scandinave, ce sont des loups qui vont dévorer le monde à la fin des temps : Fernir, fils de Loki, dévorera Odhin, Skoll avalera le soleil et Hati la lune. On n'est pas dans un contexte funéraire mais eschatologique tout court : la fin de la vie face à la fin du monde.
Le loup dans le moyen-âge devient symbole du Malin, et c'est dans ce rôle que nous le trouvons le plus souvent dans la musique traditionnelle comme dans les contes de fées.
J'exposerai dans un autre article le mythe du loup garou et son rôle d'initiateur comme nous le voyons dans des nombreux contes de fées. Dans cet article j'ai voulu donner une idée générale de ce dont on traite dans les conférences avec Silvia Vannozzi.
Sans doute je me suis inspirée à ces matériaux pour mon deuxième roman, Le chant du dieu sauvage, à paraître en 2023.
Les sources dont je me suis servie :
Les cours d'histoire de l'art grecque à l'université de Pavia ( Prof. Cristina Troso et A. Maggi), d'Etruscologie avec le professeur Maurizio Harari et mes recherches pour ma thèse en étruscologie sous sa supervision.
L'article de Raph Häussler (2016) Wolf & Mythology,
les livres :
Tommaso Braccini, « Prima di Dracula : archeologia del vampiro »
Gabriella Agrati e Maria Letizia Magini, « Miti e leggende dei vichinghi »
« Creature della notte », collection Miti e Leggende di Hobby&Works.
Quand on me demande qu'est ce que je fais dans la vie, je suis bien embarrassée de répondre. En résumant, je pourrais dire que j'ai consacré toute ma vie à chercher et offrir la beauté – cette petite ineptie si fondamentale au bien-être de tout être vivant- pour ma survie et celle de tous ceux qui en ont un besoin fondamental. Et je m'en tiens honorée.
Je suis Elisa Nicotra, une harpiste, chanteuse-auteure et écrivaine au service de la Féerie et de tous ceux qui en ont nostalgie. Bienvenue dans ma cour de miracles, d'art, de mythes et de rites.